05.07 – 09.08.2025
Projection collective, ZOOM Projection IV – ‘‘ la faune et la flore ’’ montre une diversité dans l’approche de la vie. La fragilité des fleurs, symbole de beauté et métaphore des relations humaines éphémères chez Clarisse Pillard. La contemplation de la nature et des animaux sauvages ainsi que domestiqués chez Eugénie Touzé qui enregistre des mises en scène naturelles qui ne reviendront jamais. L’animal social d’Aristote vue à travers un plan sur une cellule familiale et mis en parallèle avec une famille spirituelle ; celle de Jésus et de ses apôtres, pour Laurent Fiévet. Le corps comme instrument géométrique et de mesure d’un monde disparu avec l’invention du système métrique par Leïla Pile. L’isolement et la libération de la femme depuis un intérieur solitaire vers un extérieur naturel bourdonnant d’abeilles pour Marta Skoczeń.
Clarisse Pillard (née en 1997) est une artiste, réalisatrice et graphiste française, en Master 2 de l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris en 2025. Après une formation de design aux Pays-Bas, elle s’est tournée vers le cinéma documentaire et elle réalise son premier court-métrage Passe Encore de Bâtir en 2023. Elle fait dialoguer de mots et d’images pour questionner les relations systémiques, émotionnelles, symboliques, et souvent invisibles qui se jouent dans nos relations interpersonnelles, et notre rapport au langage, aux objets et aux médias.
Dans le film thank you, they are beautiful, des images d’une usine de lys rencontrent un scénario fictif à propos de deux consommateurs de fleurs qui dessinent les dynamiques de don et de contre don qui régissent les échanges de cadeaux. Des sphères qui semblent si éloignées et pourtant si proches dialoguent : celle des échanges monétaires, celle des échanges émotionnels et celle de la production de masse de fleurs coupées.
La série de photographies I heard that without pain there ain’t no gain montre des fleurs collectées qui n’ont pas survécu aux systèmes de production et de marchandisation des fleurs coupées industrielles — celles qui auront été sacrifiées par l’ampleur des moyens déployés.
Eugénie Touzé (née en 1997) vit et travaille entre Paris et la région Normandie. Elle est diplômée de l’ l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris en 2021. Artiste photo-vidéographe, elle développe un rapport à l’environnement par le prisme de l’enregistrement photo-vidéographique, à travers une concentration apaisée et interrogative sur le monde vivant. Animaux, humains, végétaux, paysages, ou encore manifestations climatiques, elle les observe à égalité dans un même cadre et elle tend à retranscrire la valeur de leur présence. L’espace-temps est suspendu dans son phénomène de durée et l’éphémère est entretenu. Les sentiments ambivalents déterminent ses réalisations. Selon la critique d’art Camille Paulhan, « Eugénie Touzé aime à dire qu’en photographie, elle se met en quête d’une image, tandis que dans son travail vidéo, elle attend que celle-ci apparaisse. Parfois, la magie n’opère pas, et il lui faut patienter jusqu’à la prochaine épiphanie ».
Des bêtes effleurées montre une lente succession de tableaux vivants dans les environs d’une commune, en plein cœur des élevages, et à proximité de la forêt. Les animaux domestiques, ceux des fermes alentours et les animaux sauvages, se succèdent par touches lointaines, au rythme du temps qui évolue. Les limites territoriales sont poreuses entre ces deux mondes qui ne font en réalité qu’un seul. Presque un documentaire animalier, où la seule parole est celle du paysage et de ceux qui le font, dans leur invisible visibilité.
Laurent Fiévet (né en 1969) est un vidéaste français, docteur en études cinématographiques et audiovisuelles à la Sorbonne Nouvelle Paris, en 2001. Le philosophe Fabrice Bourlez dans Chair in 69 décrit son travail en ces termes : « Les installations et les images de Laurent Fiévet peuvent être lues, analysées et interprétées selon un schéma précis. La plupart du temps, elles se déploient sur deux lignes parallèles : celle de l’histoire du cinéma et celle de la peinture ; celle de l’architecture et celle des lieux d’exposition ; celle des mouvements et celle de l’arrêt sur image ; celle de l’objet et celle du détail. Ces quatre déclinaisons n’épuisent pas la richesse de la partition signifiante qui organise formellement le travail de Fiévet. D’autres correspondances terme à terme pourraient y être ajoutées. Un dialogue opère donc entre les deux lignes. Il trouble leur déroulé respectif. Brouille les reconnaissances. Et, à même les interférences, se déploie une réflexion sensible sur le référent, le modèle, le déjà-vu. Entre les lignes, les échos résonnent selon des accords inédits. Des rapprochements inopinés, des évidences ignorées, des similitudes inattendues affleurent. La peinture des grands maîtres rencontre les monstres sacrés du cinéma. L’œuvre est conçue ou repensée en fonction d’un dialogue explicite avec l’espace de la galerie ou celui du musée. Le mouvement suspendu ouvre un espace autre pour les gestes. Un élément secondaire est extrait de l’image pour se transformer en pièce d’exposition. On plonge alors dans son œuvre comme dans un trésor de références collectives. Y triomphe l’imaginaire d’une certaine modernité cinématographique. S’y dessine une iconographie à mi-chemin entre la culture populaire, la culture générale et les raffinements de l’érudition. »
Premier des deux portraits de groupe proposés dans la série Teorema, L’Arrestation est construit sur un moment-pivot de Théorème de P.P. Pasolini où le personnage du Visiteur, incarné par Terence Stamp, repart de la maison où il avait séjourné quelque temps. Retenant le moment de son départ par des effets répétés d’inversion du flux temporel, la boucle sur laquelle se structure le montage procède, malgré l’agitation manifeste des protagonistes qui le raccompagnent en silence, à une forme de suspension faisant directement écho au sujet de L’Arrestation du Christ du Caravage dont différents détails sont superposés à la scène, par effets de surimpression. Bien que marqué au premier plan par l’interposition d’une porte vitrée qui apparaît aussitôt refermée dès qu’on tente de l’ouvrir, le seuil de la maison n’est jamais franchi dans le montage dont la structure en boucle détourne stratégiquement le spectre d’une séparation imminente pour mieux retenir le groupe intact, au sein du cadre filmique.
Leïla Pile (née en 1993, Belgique) vit et travaille à Bruxelles. Sa pratique du textile est conceptuelle, performative et artisanale. Son propre corps, utilisé comme outil de mesure, y joue un rôle central. La prise de mesure est une exploration sensible qui lui permet d’appréhender les échelles et les lieux. À travers différents médiums, elle conserve la mémoire d’un geste et interroge les possibilités d’exister d’une ligne en relation avec l’espace.
Pour l’exposition Cordées à l’Espace LRS52, Clémentine Davin dit que « dans la performance Corder, 2023, pratiques artisanale, artistique et sportive s’entremêlent avec une grande fluidité. Tout d’abord, on observe une longue ligne mouvante et discontinue de couleur écru traverser le corps de l’artiste, vêtue de noir, en son centre et à la verticale, pour ensuite venir s’enrouler autour de plusieurs de ses membres, selon un enchaînement ponctué de gestes pouvant s’apparenter à une séance d’échauffement articulaire avant effort. Poursuivant l’objectif de produire un ensemble d’écheveaux de fils de longueurs différentes, la plasticienne réactive quelques-unes des unités de mesure qu’utilisaient, jadis, les bâtisseur·ses (la paume, la palme, l’empan, le pied et la coudée), ainsi que divers corps de métiers en lien avec le patrimoine textile que sont les drapier·ères, brodeur·ses et passementier·ères, qu’elle associe à des mouvements librement inspirés de son expérience dans le maniement des cordes d’escalade pour composer son propre répertoire ».
Marta Skoczeń (née en 1994 à Łódź, Pologne) est photographe et artiste travaillant la vidéo, la photographie et le dessin. Elle est diplômée de l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris (DNSAP 2020, atelier de Clément Cogitore) et de l’Académie des Beaux-Arts de Varsovie (Master en 2019, Arts Graphiques).
Dans les récits visuels qu’elle construit avec ses photographies et ses films, il est question principalement de sujets féminins incarnant l’attente de l’autre. Les décors, aussi bien intérieurs qu’extérieurs, représentent des endroits qui sont des abris pour les personnages. Dans ces espaces où le temps est comme suspendu, ces derniers font face à l’isolement qui leur procure, dans un premier moment, une sensation de réconfort. Elle tente de montrer ce besoin de mouvement qui pousse à sortir de la dimension sécurisante que représentent nos intérieurs en allant au contact de la nature. C’est cette image de la femme enfermée de l’intérieur qu’elle souhaite libérer symboliquement.
Le Nid est son premier court métrage, réalisé dans le Sud de la Pologne. Il raconte une histoire de deux filles vivant en vase clos. Elles passent leur temps à ne rien faire; elles cousent, elles jouent, elles dorment. L’ennui se mélange avec une peur du monde extérieur, représenté par la nature et les ruches. Le contraste entre l’intérieur et l’extérieur est accentué par deux univers visuellement différents et par une sensation variée du passage du temps. Les intérieurs réconfortants constituent un abri du monde envahissant des abeilles, dont la vie structurée peut symboliser le mouvement et l’expansion du monde humain et adulte.

73-75 rue Quincampoix 75003 Paris France
mardi – samedi 14h – 19h et sur rendez-vous
tél : +33 (0)1 42 77 05 97
www.galeriedohyanglee.com